
Les fanzines do-it-yourself : un bricolage radical au service d’un média banal
Dates: 17 au 29 janvier 2017
Lieu : Médiathèque La Grande Passerelle, Saint-Malo (35).
Cette exposition présente des fanzines, c’est-à-dire des journaux fait par des amateurs passionnés. L’exposition s’attarde sur la diversité formelle et éditoriale de ces journaux apparus au début des années 1930 dans l’univers de la science-fiction américaine.
Magazine de fans, le fanzine a cette particularité d’être parfois monothématique, pour ne pas dire monomaniaque. Son objet éditorial est alors unique : un artiste (Voodoo Smile et Anomalie sur The Cure, French Violation sur Depeche Mode, Heartland sur The Sisters of Mercy, Thoughtforms sur Lush, Ride the Network sur Ride), une série télévisée (Laura in the Sky sur Twin Peaks), une équipe de foot…
Magazine amateur fait avec les moyens du bord, il dispose d’une totale liberté éditoriale et graphique, lui permettant de s’affranchir de toutes les règles médiatiques classiques. Il est littéralement « bricolé » : avec de la colle et des ciseaux pour les premiers fanzines punks créés à partir de 1976 et qui ont su imposer un nouveau langage esthétique, parfois radical, mais imités dans de nombreuses autres sphères subculturelles depuis lors (fanzines de cinéma, de BD, de football, etc.). Le fanzine est un moyen d’expression démocratique, ouvert à tous. Il est publié par de petits collectifs ou par une seule personne qui peut choisir de se mettre en scène dans le journal, qui devient alors un perzine (personal zine), sorte de journal intime publié à quelques exemplaires (Bloom, Rad Party). La vertu thérapeutique des fanzines est reconnue depuis longtemps et des ateliers sont souvent organisés dans les établissements psychiatriques ou pénitentiaires (Cordel de Mimile) : le processus de création du fanzine est un moyen de libérer les tensions intérieures ou les angoisses, une évasion symbolique de son propre corps (Dancing with Myself) ou de sa cellule.
Bricoler, c’est faire avec les moyens du bord, c’est l’obligation de faire reposer son média sur une économie de moyens qui invite au recyclage ou au détournement de l’usage premier de divers matériaux ; ainsi, la reliure du fanzine se permet-elle quelques coquetteries : rivets-pop, attaches parisiennes, écrous et boulons, bouts de ficelle…
Le fanzine, en tant que média alternatif, est un moyen pour les classes populaires, traditionnellement écartée de la production médiatique, d’acquérir un certain pouvoir (les sociologues parlent d’« empowerment »). Le fanzine peut alors devenir un véritable tremplin social. Ainsi des fanzines tels que Magic Mushroom (né à Saint-Malo en 1991 en même temps que le festival La Route du Rock) est-il devenu Magic !, un magazine musical d’audience nationale publié sans discontinuité jusqu’en 2016. C’est encore plus vrai dans le domaine de la bande-dessinée où tous les auteurs publiés dans par de grands éditeurs ont commencé leur carrière en publiant leurs dessins dans des BDzines, souvent autoédités d’ailleurs.
L’artzine est une catégorie à part, en plein renouveau depuis une dizaine d’année : il est le terrain d’expression et d’expérimentation d’artistes plasticiens qui privilégie la diffusion restreinte, le circuit court plutôt que l’édition de prestige des galeries d’art. Là encore, la démarche repose sur la volonté de contrôler sa vie et, en l’occurrence, son œuvre artistique.
Un mur de fanzines de 9 m² permettra de consulter de nombreux fanzines musicaux issus des courants punk, hardcore, metal et gothiques.