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par Chéri-Bibi » 06 oct. 2014 11:30
A la lecture des différents protagonistes de ces pages, je trouve qu'il se dégage une réflexion générale pas mal intéressante même si l'intitulé du topic est mal posé. Car non, évidemment que la violence sexiste n'est pas tolérable, mais là il s'agit plutôt d'un débat -à mon sens- sur le fait qu'on soit ou non obligé de chanter ce qu'on pense ou peut-on jouer un rôle, interpréter un personnage, et dans ce cas, n'y a-t-il pas risque d'amalgame d'une part (entre l'interprète et son personnage), et d'être pris au premier degré par une frange du public qui risquerais de plussoire au discours véhiculé par la provocation des paroles ?
Des punks ayant fait des chansons où ils se mettaient dans la peau d'un autre, antagoniste de leurs idées propres, y'en a à foison. C'est même une pratique récurrente chez Jello Biafra (de California Uber Alles à Kill the Poor pour n'en citer que quelques unes phare). Dans le registre dont il est plus particulièrement question ici, et pour ne causer que de la France, effectivement, on pense à "Sonia" de Komintern ou, plus récemment, au groupe Viol.
Personnellement, l'écoute de "Sonia" m'a toujours débecté et j'ai pris la tête au type de Viol (très gentil par ailleurs, mais il n'empêche) quant au choix du nom de son groupe, gerbant à mes yeux. De là à les confondre avec leurs "jeux de rôles", il n'y a qu'un pas que je n'ai pas franchi (mais c'est sûr qu'il m'aurait dit "On s'est appelé comme ça car on adore le principe du viol", le groupe aurait splitté à l'hôpital).
Toujours personnellement, j'adore la chanson paillarde, l'esprit d'Hara-Kiri et les disques de Tulaviok. je peux donc tout à fait comprendre qu'on joue un rôle de beauf le temps d'une chanson, voire, dans le cas du burlesque, qu'on profite que des mecs viennent mater des nichons pour glisser un contre-discours progressiste sur l'ensemble du show.
Evidemment, j'éviterais le "point godwin" de citer Costes qui, sous couvert de satire, cache un réel racisme (comme Dieudonné, l'humour ayant souvent bon dos). Là, les membres de Panty Party nous ont assurés de leur "bon fond" et il n'y a aucune raison de ne pas leur faire confiance sur ce point.
Reste que ça m'emmerde ce genre de chansons. Oui, on est en droit de jouer un rôle, de chanter au millième degré, bien sûr. On peut aussi "rire de tout mais pas avec tout le monde" et, en ce sens, considérer que le public punkifié des bars où se produit le groupe est "aware" sur les questions de sexisme (ce qui est une affirmation très très péremptoire tout de même, à moins de se produire dans un "Ladyfest", ce qui pourrait pour le coup redonner au texte son sens parodique voulu, car en l'absence de tout risque d'interprétation au premier degré du fait du contexte par essence antisexiste du lieu de démonstration).
Et si ce genre de chanson m'emmerde, c'est pas parce que je commettrais l'erreur de confondre interprète et personnage (ou alors Norman Spinrad est un nazi pour avoir écrit Rêve de Fer... Biiip, point Godwin), mais parce qu'on est saturé de messages sexistes "mainstream" et que, oui, dans nos espaces à nous (concerts punks, etc), on est en droit de souffler un brin. Ce qui ne veut pas dire jouer les ayatollah d'un purisme idéologique de façade non plus, ou d'une "police politique" dont on a bien vu -surtout à Paris- à quel point elle était aussi hypocrite que dangereuse.
Donc dans ce contexte social où le mépris des femmes, des putains, des pédés, des paysans et globalement de tous ceux et toutes celles qui ont une sexualité "marginale" règne en maitre, je vois pas trop ce que ce genre de truc apporte au schmilblick subversif, ne serait-ce que littérairement parlant (n'est pas Bukowski ou John "Pink Flamingos" Waters qui veut).
IN GIRUM IMUS NOCTE ET CONSUMIMUR IGNI
Nous tournons en rond dans la nuit et le feu nous dévore