Seulement, dire toute sa souffrance et relater les faits est une chose. Par contre, sur Indymedia and co, citer quelqu'un-e. en disant de lui ou elle « le punk violeur »/"la punk violeuse", c'est pouvoir envisager que cette personne puisse aussi s'exprimer. M. l'a fait. L'avez-vous lu ?

Il dit bien qu'à aucun moment il n'a pu deviner chez sa partenaire l'envie de ne pas aller plus loin, il ne l'a pas entendue dire non, il n'a pas ressenti de malaise. Ils se sont plu, ont sympathisé, sont allés chez elle et ont eu envie, tous les deux, d'avoir un rapport sexuel. Oui, ça craint vraiment de ne pas avoir plus parlé avant et pendant ce rapport. C'était naze de partir le lendemain sans trop parler, c'était naze de coucher bourrés, c'est absolument triste d'imaginer qu'une des deux personnes l'ait si mal vécu, mais pour autant, ça ne me permet pas de crier « M. le violeur ».
Ce rapport n'a pas eu lieu sous la contrainte de M., ce rapport n'a pas été le seul désir de M., M. n'a pas ressenti le malaise de S. La pression ressentie par S., ses inquiétudes, son stress, ses attentes sont absolument compréhensibles, sa douleur ensuite de ne pas avoir pu continuer à voir M. ni à continuer quelque-chose (elle dit qu'ils auraient pu être potes) sont absolument compréhensibles.
Son ressenti de viol ne doit pas être nié et sa parole doit être et a été entendue. Mais son témoignage, et je suis catégorique là-dessus, ne me permet pas de dire « M. est un violeur », ni qu'il a profité d'une fille ni qu'il est dangereux. Et tout l'intérêt de la discussion est là. Peut-être que si les internautes ne partaient pas de ce fait établi, mais essayaient de se débarrasser des ont-dit lus sur les pamphlets de forum où plus personne ne réfléchit par soi-même, peut-être qu'on pourrait réussir à entendre ce que M. a à dire et sans doute y trouverait-on quelque-chose de positif. J'ai lu sur un forum féministe : "on ne peut pas se faire d'avis sur cette personne juste par le biais de la brochure" et une réponse directe à ça: "Si. M. est bien connu pour être un violeur, c'est tout." Mais aussi: "Il faudrait prévenir tout son entourage, pour que tout le monde soit au courant". La bêtise a de beaux jours devant elle.
A bas tous les sexismes c'est ça ? c'est ce que vous criez haut et fort ? alors écoutons S. Mais écoutons M. aussi.
C'est facile de penser: à la suite des déclarations de S. moi j'aurais réagi comme ça, M. aurait dû faire comme ça, quand ce n'est pas soi qu'on accuse d'être un violeur. Car oui les mots sont importants. Loin de nier le ressenti de S. encore une fois, voir fleurir des gros titres comme « M. le punk violeur » ou « un festival antifa promu par un violeur » et ne pas comprendre la légitimité de M. à vouloir donner sa vision des faits et son ressenti à lui, témoigne d'un manque d'empathie inquiétant et d'un sexisme latent.
Mettez-vous à sa place. Essayez. Imaginez l'impact sur vos proches, votre/vos amoureux-se-s, votre famille, vos ami-es. Pour ma part, et je pense que c'est mon droit de m'exprimer là-dessus puisque les deux personnes dans cette histoire ont voulu parler sur internet, mais aussi en tant que victime d'un rapport sous la contrainte par le passé et donc, me sentant concernée par le besoin de dialogue actuel:
Je ne considère pas que M. ait nié la douleur de S., il lui a écrit, lui a proposé d'en parler quand elle a publié « Combien de fois 4 ans". Dans sa réponse actuelle, M. parle de ce qu'il avait écrit à S. à l'époque : "Te sentais tu déjà aussi blessée que tu l'es aujourd'hui ?! Es tu si mal que plutôt que venir m'en parler à moi, directement ou par mail, tu préfères le dire à tout le monde ?! Il y a beaucoup de choses que je ne comprends pas, et je suis stupéfait de la situation dans laquelle tu es aujourd'hui... J'aimerai vraiment comprendre comment est ce que j'en suis arrivé à te faire aussi mal... Est ce que c'est possible qu'on en parle, par mail ou en vrai ?"
Dans sa réponse d'aujourd'hui, sans nier la douleur de S., il fait part de sa douleur à lui, d'être assimilé à un violeur, et décrit comme tel sur des sites très consultés par tout le mouvement et par des personnes qui n'ont ni lu la brochure de S., ni lu sa réponse à lui. Il à cherché à comprendre, il aimerait aider, apaiser. Le traîner dans la fange sans chercher plus loin, en le marquant au fer rouge de manière indélébile sur internet, socialement: "violeur!" et refuser qu'il essaie de s'exprimer, me paraît purement intolérable.
Courage à S., qui a réussi à exprimer ce qu'elle a vécu comme un traumatisme, son mal-être et que nous devons entendre, j'espère sincèrement qu'elle arrivera petit-à-petit à trouver de l'apaisement. Courage à M. qui n'est pas un monstre à envoyer au bûcher, et qui, pas en tant qu'accusé ni en tant qu'homme, mais en tant qu'humain, a eu le courage de s'exprimer et qui a eu raison de le faire.
L'immense gâchis ici : le manque de dialogue et la rumeur qui enfle, par le biais de groupes qui se forgent une idée toute faite pour clamer haut et fort leurs valeurs, sur leurs sites et/ou fanzines, en tant que masse, sans impartialité, sans libre-arbitre, sans rechercher l'apaisement, sans empathie.
C'est bien ça qu'il faudra voir évoluer dans nos sphères keuponnes/contestataires.